Mulhouse Istanbul à vélo

Jours 27 et 28

🇷🇸 repos a Belgrade 0km
Après 26 jours, propulsé vers l’avenir et mon passé, à la seule force de mes muscles… mon corps tout entier tambourinait à la porte du repos.
 
Sous ma tente à Sombor, 20km après mon entrée en Serbie, puis 1 journée de vélo plus loin, à Novi Sad, la tentation de prolonger l’arrêt était forte, mais Belgrade, encore 80km au sud semblait être la bonne charnière.
 
Cette autre capitale sera la porte vers le deuxième chapitre de mon voyage.
 
Le Danube me tend sa main:
– Tu es prêt maintenant.
– Prêt à quoi ?
– À aller voir.
– D’accord Danube, mais quoi donc ?
– Tu verras bien.
– Vous jouez les mystérieux, ça me plait, mais je suis un curieux… donner moi un indice.
– Les portes de fer !
– La barre de fer ? La barre de tout faire ???
– Tu riras moins dans quelques kilomètres.
– Je sais, il s’agit de cet endroit où tu éloignes les rives roumaines et serbes à un kilomètre l’une de l’autre et où même les braves doivent pousser le vélo dans les pentes abruptes des montagnes.
– Exact.
– Tu penses donc que je suis prêt pour cette partie du voyage ?
– Ton coeur est prêt… pour ce qui est de tes jambes, on verra bien.
– Et après ?
– Minute papillon. Passe les portes de fer et nous parlerons des montagnes Bulgares seulement après.
– C’est pas du yogourt ?
– À demain petit rigolo.
 
Ce deuxième chapitre jusqu’à Istanbul, comporte 9150 mètres de dénivelé positif.
 
C’est comme si jusque-là j’avais été sur un tapis roulant plat, et que maintenant il fallait monter 30 fois en haut de la tour Eiffel par les escaliers, avec 4 packs de 6 bouteilles d’eau à porter.
 
Naturellement, il n’y aura pas de vent de face ni de températures élevées.
 
Ce qui est certain, c’est que les paysages vont être magnifiques… et la victoire sur moi-même tout autant.
C’est donc 2 jours et 3 nuits de repos que je me suis octroyé a Belgrade.
 
“Chi va piano va sano e chi va sano va lontano”
 
Souvent traversée en voiture, là j’ai pu découvrir la ville, ses géants, ses bus gratuits (personne ne paye plus le bus depuis 2 mois, même les conducteurs vous disent de monter sans payer. Le nouveau système de paiement par SMS n’a pas été accepté par la population) ses monuments et parcs, ses jolies femmes et leur pendant masculin que je ne comprends résolument pas.
 
Comment les Serbes ont-ils bien pu faire la guerre ???
 
Il y a tant de très belles femmes au mètre carré qu’il ne viendrait à l’esprit sain d’aucun homme d’aller gaspiller son temps, son énergie et peut-être sa vie à s’en prendre à celle des autres.
 
Comparé à ces molosses, je parraîs minuscule. Mon fier mètre quatre-vingt me ramène au statut de bibelot.
Un turc de poche que toute femme Serbe veut porter dans son sac à main, en pendentif ou boucles d’oreilles.
Mon originalité gallo-ottomane de petite taille les attire avec hystérie. Dans la rue, pour leur échapper, je slalome et les esquive, grimpe et saute d’un lampadaire à l’autre, consens un selfie à l’une et pousse la suivante pour me diriger vers un autre bus gratuit. Il arrive même, lorsque la rue devient trop étroite, de devoir leur marcher dessus pour m’enfuir.
 
Mon short est solide et comporte des traces de verni, le t-shirt est fichu et mes chaussures ressemblent à deux hérissons avec pour épines, des faux ongles multicolores plantés dessus.
Pourquoi tant de résistances là où n’importe quel mammifère mâle se laisserait recouvrir par tant d’amour Serbe ?
 
C’est la question que m’ont posé les trois jeunes à mon retour à l’auberge.
 
La vingtaine, un canadien bodybuildé, un sud-coréen assoiffé de tourisme, et un espagnol fort candide regardent les faux ongles tomber de mes chaussures et lorsque je leur montre la photo de ma femme que j’ai importée de Bruxelles-ma-belle, leurs mâchoires font un bruit d’enclume en tombant a leurs pieds.
 
Voilà Émilie, leur dis-je. J’admire ces beautés yougoslaves, mais ma Belgique a beaucoup de points d’avance… et sans faux ongles.
 
Le bus gratuit est assez grisant. Je me laisse transporter… mon Cheval Bleu se repose dans la cave du quartier des restaurants avec chanteurs tsiganes à chaque terrasse.
 
Un trolley-bus me dépose devant la petite soeur de Sainte-Sophie d’Istanbul. Puis sur les conseils de Milica, jeune étudiante en économie, je repars à pieds vers plusieurs découvertes touristiques. Milica, parle un anglais impeccable, italien mais aussi turc !
Cette dernière langue qu’elle comprend parfaitement lui vient de séries turques regardées avec sa maman depuis ses 6 ans.
La ville est un patchwork de moche, de beau, de moderne et d’ancien. Une sorte de Dunkerque poste communisme puissance 100.
 
Moi j’aime Dunkerque, eh oui.
 
Du haut de la forteresse et du parc Kalemegdan (du turc Kale meydanı) je borde le soleil qui en Serbie est fan de Johnny, et il met le feux au ciel, au Danube et à la Save.
 
Le point de vu sur la ville est incroyable.
 
Les moustiques piquent, mes yeux aussi…
 
Rideau de nuit.
Demain le Danube m’attend.